Quand la protection des oiseaux sauvages l’emporte (encore) sur la tradition
Article juridique – Droit animalier
Après les avoir suspendus fin octobre 2022, le Conseil d’État vient d’annuler les arrêtés du 4 octobre 2022 relatifs pour l’un à la capture de l’alouette des champs à l’aide de matoles (cages pièges) dans les départements des Landes et du Lot-et-Garonne, et pour l’autre à la capture de l’alouette des champs au moyen de pantes (paires de filets horizontaux) dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-et-Garonne et des Pyrénées Atlantiques. Il a en effet estimé que ces arrêtés méconnaissent les objectifs de l’article 9 de la directive européenne du 30 novembre 2009, dite directive Oiseaux. Cet article encadre les conditions de dérogations aux articles 5 à 8, lesquels interdisent notamment aux États membres de recourir « à tous moyens, installations ou méthodes de capture ou de mise à mort massive ou non sélective ou pouvant entraîner localement la disparition d’une espèce ».
Plus particulièrement, dans sa décision rendu le 6 mai 2024, le Conseil d’État a notamment relevé qu’au mépris de la directive susvisée et de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne :
– « alors que les arrêtés attaqués n’explicitent pas dans quelle mesure la capture d’alouettes des champs à l’aide de pantes et de matoles participerait à la conservation et à la protection de la biodiversité, le motif de la dérogation prévue par le dispositif réglementaire réside principalement dans l’objectif de préserver l’utilisation de modes de chasse constituant une pratique traditionnelle qui, ainsi que l’a jugé la Cour de justice de l’Union européenne, ne saurait à lui seul justifier de l’absence d’autre solution satisfaisante » ,
– « Les ministres comme les fédérations intervenantes ne démontrent pas que les prises accessoires résultant de l’emploi de pantes et de matoles dans les conditions prévues par les arrêtés attaqués, ne concerneraient effectivement qu’un faible nombre d’oiseaux. […] Il n’est par ailleurs pas davantage démontré que les dommages causés aux oiseaux capturés non ciblés pourraient être regardés comme négligeables. »
➡️ CE, 06 mai 2024, n°468145, Inédit au recueil Lebon
➡️ CE, 6 mai 2024, n°468146, Inédit au recueil Lebon
➡️ Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages
➡️ Chasses traditionnelles à l’alouette : le juge des référés du Conseil d’État suspend les nouvelles autorisations – 21 octobre 2022